Elle détruit et donne la mort à tout ce qu’elle touche;
La peau, elle la marque, le tabac, elle le brûle, et le poumon, elle lui impose son enfer noir et cancéreux d’un train sans fin s’enfonçant dans le fond de la dépendance;
La cigarette danse et danse au bout de ma bouche et de celle, de ceux qui l’entoure, enveloppé de leur bec sec, ratatiné, raté, l’amour d’un baiser envolé;
La cigarette au bout de mes lèvres comme un baiser alcoolique.
J’ai une étoile rouge au bout de ma cigarette,
Je l’aspire, pire encore, je la dévore par mes bronches;
Le bout de ma clope rongée par la boule de chaleur, luisante sur le manche et sombre en fumée;
L’argent envolé, enfumé dans un paquet de vingt, vingt fois plus coûteux que la chaleur d’un regard posé sur ma personne.
Notre monde part en fumée. Notre économie part en fumée;
Le Québec, notre culture, la langue française ainsi
Que les langues autochtones partent en fumée;
Ma tête n’est que fumée, mes jambes fumées, mes bras fumées;
La terre, si belle, si naturelle, couleur fumée;
Brique par-dessus brique, fumée;
Les bombes tombent, fumée, fumée noire;
Nos ombres disparues, par la fumée.
Les soirées de boite, à boire, éclipsé par la fumée;
De Saint-Denis à Saint-Laurent, des bars miteux où les mineurs, telle une fumée paisible, se faufilent dans la fumée d’évènements d’un soir, de bars de fumeurs. Tout le monde fume.
Quelle idée m’as-tu mis dans la tête, pauvre misère!
En marchant et en contemplant les rivières d’explosions polychromatiques polluant le ciel d’un miel bien bruni sur une toast de guimauve volante m’as-tu averti avec des sons stridents et assourdissants!
Était-ce un appel à la guerre, Gaza en feux et la construction de l’Homme à la perte, aux cieux, de mots volants chantés par les armes de la mort;
Une prière à la renaissance,
Une prière à la malchance des peuples bunker du monde capitaliste;
Une prière au tout début d’une réalité naissante obscure,
Cure à cet imaginaire en guerre.
Mais je ne pense guère que ce qui se passe outre-mer n’est béate,
Puisque la fête va bientôt finir,
Elle attend seulement que quelqu’un frappe,
Et se met à battre,
Contre les portes de notre perception obstruée par la désinformation.
L’océan
Penser pour penser,
Crier, hurler, être admirée,
Tout ça pour s’oublier, ou ne pas se faire oublier,
Laisser une trace,
Être mémorable,
S’octroyer une valeur imaginaire,
Penser que les autres tiennent à nous,
Effaçant ainsi notre valeur de mouche.
Je suis qui moi?
Qu’est-ce que je fais ici?
Pourquoi tu tiens à moi?
Pourquoi je tiens à toi?
Est-ce que je pense à toi?
Pourquoi j’en suis là?
Je ne sais plus qui je suis,
À trop vouloir de toi, le cœur en étoile,
Mes rêves sont de passage,
Je crois bien que je fais naufrage,
À quoi bon écrire si ce n’est que pour être lue?
À quoi bon penser si ce n’est que pour s’effacer?
Et si je disparaissais, penserais-tu encore à moi?
Mon âme est en naufrage,
Mon cœur souffle des échos d’appel à l’aide,
Je pourrais tout arrêter,
Lever le doigt et rouvrir les yeux,
Sortir, flâner, m’amuser,
Exister aux yeux de mes amis,
Et enfin mordre dans ma vie,
Et enfin mordre dans ma vie,
Mais je ne veux pas, je ne veux plus.
Pars loin de moi, je m’en fous,
Je ne sais plus qui je suis, je ne sais plus continuer ainsi,
Je regarde ma vie passer,
La renier me rassure,
Y rêver me fait pleurer,
Tic-tac, tic-tac, tic-tac,
Toujours cette impression que le temps s’est arrêté, alors qu’il ne fait que filer,
Je n’ai plus peur du noir,
Je ne veux plus être une star,
Je coule et j’ai peur,
Danser me fige le sang,
Je ne sais plus où aller,
J’entends cette voix et on dirait que c’est l’océan,
Le néant m’attend.
Léa Hains, « Taille de petit poids », p.38
Si vous voulez lire le reste de ce magnifique recueil de poésie écrit par Léa Hains, une étudiante au Cégep du Vieux-Montréal, le lancement de son livre se déroulera le samedi 11 novembre à La Finca café & marché local à partir de 17h.