Adapté du roman de Victor Hugo, L’Homme qui rit sera présenté par le Nouvel Opéra Métropolitain au Festival Classica 2023 le 31 mai prochain. Grâce aux thèmes de cette œuvre, le librettiste de l’opéra est confiant de pouvoir intéresser les étudiants du Cégep du Vieux Montréal.
Le librettiste derrière l’adaptation est le poète et romancier Bertrand Laverdure. Il souhaitait créer un opéra « en même temps accessible, donc pour le grand public, et qui allait satisfaire les connaisseurs ».
Des thèmes familiers
« C’est une œuvre qui prône la démocratie, le socialisme et qui nie le pouvoir des privilégiés du 1% des aristocrates et des oligarchies du monde entier », raconte-t-il.
Bertrand Laverdure remarque quelques parallèles avec le monde actuel : « Gwynplaine, le personnage principal, pourrait être une sorte de Greta Thunberg. Il a quand même 25 ans [et il] essaie de réveiller les lords, les aristocrates qui sont complètement engoncés dans leur privilège, leur luxe et leur confort. »
« Les comprachicos, poursuit-il, ceux qui s’en sont occupés jusqu’à dix ans et qui l’ont mutilé pour que personne ne le reconnaisse […] peuvent être comme les immigrés, ceux qui traversent la Méditerranée et qui sont un peu comme des réfugiés à vie. »
Une première pour Bertrand Laverdure
Crédit : Courtoisie Bertrand Laverdure
Mis en musique par le compositeur Airat Ichmouratov, c’est le tout premier livret d’opéra de Bertrand Laverdure. « J’ai écouté des opéras, j’ai lu des livrets, j’ai annoté le livre avec une liste de scènes importantes à ne pas omettre dans l’écriture du livret et à partir de ça, j’ai écrit mon premier livret. »
« Après ça, le master class, c’est de travailler avec le compositeur, continue-t-il. Il sait ce qui peut se mettre en musique, et […] ce qui peut être chanté. »
Deux grands défis se sont posés lors de la rédaction du livret : l’efficacité et la fidélité à l’œuvre de Victor Hugo. « Il faut réduire genre 800 pages en à peu près 70 pages, dit-il. Mon premier but était de rester fidèle. »
En même temps, « si on veut être trop à la lettre, comme le livre, on va se départir d’occasions pour créer des moments émotifs plus forts. […] Ce n’est pas une transposition, c’est vraiment une création à partir d’une matière qui existe déjà. »
L’actrice Christine Beaulieu, une des portes-paroles de cette édition Crédit : Courtoisie/Camille Gladu-Drouin
Amateurs de cinéma québécois, les Rendez-vous Québec Cinéma sont de retour pour une 41ème édition !
Si vous aimez le cinéma québécois, vous allez être ravis. Près de 300 films seront présentés pendant cette édition dont 76 en grande première.
La programmation se répartit entre quatre endroits : Le Théâtre Maisonneuve, le Cinéma Impérial, la Cinémathèque québécoise, au Cineplex Odeon Quartier Latin (situé à côté du CVM), ainsi qu’à la Maison du développement durable.
Une place au court-métrage étudiant
Tout d’abord, le festival donne une place à la relève étudiante en présentant 41 courts-métrages étudiants. Le festival met également en place le «Rendez-vous étudiant» qui consiste à des activités dites «brise-glace» entre les étudiants avant les projections.
Du côté de la programmation régulière, c’est le film « Le Plongeur » de Stéphane Leclerc mettant en vedette Henri Picard qui a ouvert cette édition au théâtre Maisonneuve de la Place des Arts La comédie Farador réalisée par Edouard Tremblay sera le film qui clôturera cette édition.
Plusieurs premières et 6 à 8
Le festival sert de rétrospective afin de présenter ce qui a été produit dans le domaine du cinéma québécois 2022 mais c’est aussi une occasion de présenter des films en grande première. 76 premières seront présentées en tout lors de cette édition. Des soirées Tapis bleu vont présenter des films québécois en première mondiale dont Frontières de Guy Édoin ou encore Crépuscule pour un tueur de Raymond St-Jean.
Des soirées 6 à 8 sont également prévues à la cinémathèque québécoise. On y fêtera par exemple, les 12 ans du Prix collégial du cinéma québécois. En plus des 6 à 8, des soirées spéciales sont également prévues dont une fêtant le vingtième anniversaire du film Gaz Bar blues.
Les rendez-vous Québec cette année, c’est :
50 longs métrages de fiction
32 longs métrages documentaires dont 5 présentés en grande première
156 courts-métrages présentés à travers 21 programmes
Les rendez-vous Québec Cinéma : Du 22 février au 4 mars
Dans le cadre du concours d’écriture féministe ayant pour thème « Regard de l’homme », La rédaction de L’Exilé est heureuse de publier le texte de Morgane Gordon, gagnante de la compétition.
i am the monster under your bed n’aies pas peur ma belle à 25 ans on n’a plus peur des monstres sous le lit on n’a plus peur de se faire attraper par leurs pattes immondes elles ne s’accrochent plus à nos chevilles ne nous attirent plus vers lui on n’a plus peur de se faire regarder par leurs yeux répugnants qui nous dévisagent et nous espionnent le monstre vicieux ne se cache plus sous le lit
i am the monster under your bed n’aies pas peur ma belle c’est un compliment un petit surnom affectueux tu es tellement charmante tu capotes pour rien je veux juste être gentil n’aies pas peur ma belle je te souris mes yeux descendent légèrement avant de retourner aux tiens n’aies pas peur ma belle ma main sur ton épaule n’est qu’un signe familier
i am the monster under your bed n’aies pas peur ma belle embrasse ta gêne sois fière de ta honte plante-la au plus profond de toi croque d’une seule bouchée la douleur n’aies pas peur ma belle arrache ton amertume subit la violence passive laisse-toi marcher dessus pour savoir ce que ça fait n’aies pas peur ma belle ignore-le avale ta voix tu n’es pas écoutée de toute manière
i am the monster under your bed n’aies pas peur ma belle tu es une femme au dos rond au corps ondulé la pièce de viande de ton corps se déchire sous tes propres dents n’aies pas peur ma belle tu es une femme au passé joyeux au regard éteint tu vas être un objet brisé utile n’aies pas peur ma belle tu es une femme qui a peur d’être femme laisse-moi t’expliquer comment être femme n’aies pas peur ma belle aiguise tes cicatrices elles ne sont que mentales
Selena Fortier parlant à nos deux journalistes Meggie Cloutier-Hamel et Xavier Beauchamp après sa « showférence ». Crédit photo : Philippe Le Bourdais
Allier humour et sensibilisation à la violence conjugale, c’est le pari que fait la militante Selena Fortier. Dans Hochelaga-Maisonneuve, le 26 novembre dernier, au Bistro le St-Cath, l’ambiance est conviviale et la jeune femme nous accueille avec bonne humeur pour sa conférence sur un sujet austère. Et pourtant, elle y arrive.
« Je trouve que la violence conjugale est très dans une case, puis c’est pour ça que bien des gens ne se reconnaissent pas, fait que j’ai envie de sortir ça de la case, puis d’ouvrir le dialogue, puis en parler sur des plateformes où on n’est pas nécessairement habitué » – Selena Fortier
Son histoire
La conférence rapporte les événements que Selena Fortier a vécu il y a quelques années. Tout commence par sa rencontre avec un homme, un homme qui lui plaisait beaucoup. Au début de leur relation, elle remarque des comportements étranges de la part de son amoureux. La situation se dégrade avec le temps : « C’est sûr qu’il y avait tellement d’affaires qui ne marchaient pas […] mais j’étais tellement certaine que c’était l’homme de ma vie, mais en même en temps je ne voulais pas vivre ce qu’il me faisait vivre », nous confie-t-elle. Elle essaie à plusieurs reprises de le quitter ou d’améliorer les choses, notamment avec une thérapie de couple, mais rien n’y fait. Presque deux années passent et elle réussit à le quitter définitivement et débute son « processus de rétablissement », comme elle le mentionne.
Après sa rupture, il lui faudra environ deux ans de psychothérapie et l’aide de divers soutiens pour qu’elle se sente mieux, nous affirme-t-elle. En effet, Mme Fortier relate qu’elle a eu recours à plusieurs ressources pour l’aider, comme le Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC), mais que son processus est surtout une démarche d’introspection. De là est né son projet sur la violence conjugale, baptisé « showférence ». Détentrice d’un baccalauréat en psychologie, Mme Fortier a quitté le milieu de l’intervention psychosociale pour se concentrer sur ce projet qu’elle affectionne énormément.
Éventail d’émotions
La présentation de Selena Fortier est construite de différentes parties qui relatent ce qu’elle a vécu. On nous avertit d’ailleurs de la présence de propos sensibles au début de celle-ci. Tous les moments racontés sont vrais nous dit-elle. Les anecdotes sont racontées entre présent et passé. On comprend les idées contrastées qu’elle a ressenties durant cette relation entre amour, haine, incompréhension, peur. Des voix hors champ, de la musique, des costumes, un « violentomètre », des dessins et la participation du public s’ajoutent à sa « showférence », car bien que dans le cadre du 26 novembre dernier, elle présentait son discours comme une conférence, Mme Fortier considère que ce nouveau terme est plus représentatif du dynamisme qu’elle amène. « Je suis toujours en apprentissage, ça fait partie du réalisme que je raconte mon histoire, que j’arrive avec des moments où c’est parfois maladroit, parfois cocasse, ce qui fait la magie du moment », souligne-t-elle.
La place de l’humour
L’approche humoristique de la « showférence » de Selena Fortier provient d’un besoin de reprendre le pouvoir sur sa vie et d’aller vers le positivisme. C’est dans ses cours du soir à l’École nationale de l’humour qu’elle se sent à l’aise et encouragée à parler de la violence conjugale qu’elle a vécue à l’aide d’anecdotes. En juin 2022, elle participe au MiniFest, un festival d’humour montréalais qui lui donne confiance pour se lancer dans le domaine. Celle qui se définit comme une activiste raconte, à travers la « showférence », son histoire en espérant changer la manière d’aborder le thème de la violence conjugale. Son initiative lui a notamment value une bourse du programme « Tous engagés pour la jeunesse » de Desjardins et Noovo offerte durant l’émission La semaine des 4 Julie.
Le message qu’elle souhaite envoyer
Par son action, Mme Fortier désire libérer la parole sur la violence conjugale. La militante désire dépoussiérer cet enjeu, en faisant changer la honte de camp et en sortant le thème de la violence conjugale de sa case lourde. Elle vise aussi le milieu de la scène, en abordant des sujets qui lui tiennent à cœur. Elle rappelle l’importance de l’organisme SOS violence conjugale qui vient en aide à tout individu qui a vécu de près ou de loin les conséquences de telles situations. Son but est donc d’ouvrir le dialogue, à son échelle et de manière positive.
Manga du mois : That Time I Got Reincarnated Into A Slime
Image du livre Moi, quand je me réincarne en slime de Fuse
Au Japon, les mangas sont ce que les bandes dessinées sont en Amérique du Nord. Leur seul particularité, c’est qu’ils sont très petits et qu’ils se lisent de droite à gauche. Cependant, ceux-ci peuvent parfois devenir très populaires et engendrer un succès tel, qu’on s’empresse de créer des adaptations cinématographiques ou des dessins animés. Ce manga de Taiki Kawakami, qui vous est proposé ce mois-ci, était originalement un roman de Fuse. Il s’intitule : « Le jour où j’ai été réincarné en slime ». Celui-ci va d’ailleurs voir sa première adaptation en film sortir au cinéma le 25 de ce mois. On suit dans cette histoire les aventures de Satoru Mikami, salarié lambda tout à fait banal, qui après avoir été assassiné, se retrouve réincarné dans un autre monde. À son plus grand dam, il se retrouve dans le corps d’un slime, une créature à l’apparence gélatineuse qui est aussi le monstre le plus faible de tout le bestiaire fantastique. De plus, il n’obtient pour seuls attributs les capacités « Grand Sage » et « Prédateur ». Néanmoins, cette réincarnation fortuite marque le début d’une grande et palpitante aventure remplie de rebondissements et de fantaisie.
Pour tout les fans de « sword-fantasy », ce manga, avec tous les éléments de fantaisie variés et recherchés ainsi que l’intrigue de l’histoire, vous plaira sans équivoque. L’adaptation en anime est également excellente.
Si vous êtes intéressés par cette œuvre, sachez que le manga, les histoires dérivées et les romans associés sont en vente dans la plupart des libraires. De plus, les deux saisons du dessin animé sont disponibles sur toutes les plateformes de diffusions spécialisées. Alors restez à l’affut pour une prochaine critique littéraire. À bientôt pour une nouvelle chronique et bonne lecture!
Un livre qui a le potentiel de plaire à tous, c’est ce qu’on peut appeler une perle rare. De la réflexion sur le monde littéraire à la culture populaire, quelques séries de poèmes mènent jeunes comme aînés à la réflexion.
Photo : Marianne Dépelteau / L’Exilé
Une déclaration d’amour et d’amitié
Le livre est divisé en cinq sections, dont les quatre dernières s’adressent à quatre destinataires mentionnés dans l’ouvrage. En plus du titre, on peut avoir l’impression de ne pas être invité à lire la suite, pourtant, les poèmes sont parsemés de références tantôt amusantes, tantôt qui portent à réflexion.
La première partie, écrite en 2015 lors d’un séjour à Paris, traite de l’aspect commercial des livres. « Je parle de la rapidité avec laquelle on gobe les produits culturels, explique l’auteur, on a transformé tout le vocabulaire qu’on réservait à la littérature pour le marketing […] on dit ‘‘on consomme des livres’’, ‘‘on consomme la culture’’, on parle des chiffres de vente des livres. »
« On a oublié de réfléchir, de les appréhender de façon complexe, de lire en détail, de façon fine », déplore-t-il.
La deuxième section regroupe des poèmes écrits durant la pandémie sur Twitter accompagnés du mot-clic #covidpoèmes. Celui-ci a encouragé la participation de nombreux utilisateurs pendant plus de deux semaines avec pour but de leur donner la possibilité d’exprimer ce qu’ils vivaient.
La troisième rend hommage à l’amour entre colocataires. Inspiré par la relation avec sa « coloc », Gabrielle Boulianne-Tremblay, Bertrand Laverdure explore ce rapport en zone grise qui n’est, selon lui, « pas de l’amitié, pas de la camaraderie, mais qui est une sorte de bienveillance, une sorte d’amour platonique ».
La quatrième section présente une autre grande amitié, cette fois-ci avec l’artiste Gauthier Keyaerts qui a pris la photo de couverture. Les poèmes sont tirés de cartes postales échangées entre eux, Keyaerts habitant à Bruxelles. Ce n’est pas la première fois que le concept de poésie sur cartes postales apparaît dans les œuvres de Laverdure, qui a fait quelque chose de similaire avec son ami Charles Sagalane l’année dernière.
La cinquième section consiste en une suite de poèmes retenue comme demi-finaliste au Prix de poésie Radio-Canada 2020. Retenu pour la troisième fois, l’auteur est flatté : « de savoir que des lecteurs sous anonymat aiment ce que je fais, sachant que je change de style à chaque fois, qu’ils me choisissent parmi 800 ou 1 000 suites de poèmes, ça me fait un petit velours. »
Dans cette dernière partie, Bertrand Laverdure s’adresse aux femmes en situation d’itinérance à Montréal. Il se demande à quoi ressemblent leurs vies, et fréquentant souvent la station de métro McGill, s’inspire des personnes dans cette situation qu’il croise souvent à cet endroit.
Photo : Bertrand Laverdure – Courtoisie
Des références « pop »
L’auteur n’hésite pas à faire référence à la culture populaire et aux jeunes artistes qu’il admire. En effet, Billie Eilish et Timothée Chalamet ont fait couler l’encre dans la poésie québécoise.
L’image en couverture, prise dans une berge en Grande-Bretagne, est la figuration du milieu littéraire illustrée par le poète dans la première section : « c’est un petit milieu très fragile, écologique, où l’équilibre est instable. Moindrement qu’il y a de la pollution – commerciale, publicitaire ou économique – ça tombe. Moindrement qu’on pille dessus, qu’on est agressif, ça se décompose. Ça tient à des fils. »
Le livre est disponible en ligne, ainsi que dans plusieurs librairies. Faites vite, le livre est déjà parti en réimpression!
Montréal l’hiver, l’amour perdu, les déneigeuses, une conversation intime, le parc Lafontaine, le deuil.
Photo : Beca Slack – Courtoisie
Prière pour une mitaine perdue suit quelques personnes qui cherchent à retrouver leurs objets perdus dans les transports en commun. Nous assistons, cachés derrière la vitre du comptoir à la station Berri-UQAM, à des airs concernés, nerveux, échauffés. Les personnages fouillent désespérément dans des tas de clefs rouillées et de tuques abandonnées. Bientôt, nous quittons le métro pour aller chez ces personnages et connaître leur vie. Pendant 79 minutes, en noir et blanc, une question leur est posée :
« Qu’est-ce que vous avez perdu que vous voudriez ravoir ? »
Le documentaire a fait une deuxième sortie en salle l’hiver dernier, ayant été différé de sa programmation originale en 2020 en raison des mesures sanitaires. Prière pour une mitaine perdue est le sixième film du réalisateur Jean-François Lesage. Dans chacun de ses documentaires, il trouve ses personnages au moment du tournage, souvent dans des lieux publics. Après des études en droit et quelques années comme journaliste, il tombe en amour avec le cinéma chinois, déménage à Pékin et devient documentariste. Lesage fait preuve d’une curiosité allocentrée pour ses sujets et il croit à « l’idée que toute personne pourrait faire l’objet d’un documentaire ». « Je crois que la parole de chacun de nous peut être intéressante si on l’écoute : c’est une question de regard. »1 Le film gagne plusieurs prix dont celui du meilleur long métrage canadien au festival Hot Docs de Toronto, qui est reconnu comme le plus grand festival de documentaires en Amérique du Nord.
Rapidement, le film laisse tomber sa mitaine perdue et entre dans un univers psychologique: le deuil de ceux qu’on ne connait pas. Bien que le documentaire peint un portrait sociologique, voire philosophique, des peines et des amours de Montréalais.e.s, il est porté d’une incontestable poésie. L’objet perdu n’est donc pas le thème central du film, à la déception de certain.e.s, mais au réjouissement d’autres, puisque la suite en vaut la peine. Le sentiment de perte nous prend et on espère avec ces êtres qui nous sont devenu.e.s familier.ère.s un printemps plus doux. Doucement, les sujets ne se livrent plus à la caméra, mais entre eux; nous devenons observateur.trice.s de leurs conversations.
Marianne Polska excelle à la direction photo, le contrôle de la lumière est impeccable et aucun cadrage ne distrait des sujets. Grâce aux mouvements de la caméra et aux différents effets de mise au point, il nous est possible de voir celles et ceux qui ne parlent pas, mais qui écoutent, qui attendent de parler. Ces effets ne sont pas parfaits, certes, mais ils ajoutent à cette sensation de vraisemblance que le film apporte. Les séquences sont toutes assez longues pour nous donner le temps d’absorber toutes les subtilités de leurs conversations. Nous vivons leurs malaises, leurs amours, leur tristesse, leur solitude et leur empathie.
Des plans plus calmes s’emmêlent entre ces témoignages forts en émotions. Accompagnée d’une douce musique jazz, sous nos yeux se dévoile une nuit d’hiver montréalaise. Un rythme mélancolique est créé, le montage nous permet de faire introspection, à se demander si nous aussi nous avons perdu quelque chose qu’on aimerait retrouver. Durant une de ces scènes sans paroles, L’écharpe interprétée par Félix Leclerc joue. La neige et les patineurs du Parc Lafontaine valsent et on pleure un peu. C’est ici que Jean-François Lesage montre sa grande humanité, il nous laisse le temps de tomber en amour avec la parole d’un.e étranger.ère. Ces séquences sont très touchantes, voire thérapeutiques.
Note : ★★★★½
Le film n’est plus en salle mais il est possible de le regarder en ligne sur plusieurs plateformes de visionnement telles que celle des Cinémas Beaubien, du Par et du Musée ainsi que celle du Cinéma Moderne.
Cliquez ici pour visionner la bande annonce du film.
L’étudiant au DEC en danse contemporaine ou en danse classique du Cégep du Vieux Montréal (CVM) doit faire ses trois cours obligatoires d’éducation physique, bien que son entrainement dépasse les 25 heures par semaine. Les étudiants ne comprennent pas pourquoi on leur en demande autant et la complexité du dossier rend le sujet délicat pour les institutions scolaires.
Photo : Meggie Cloutier-Hamel / L’Exilé
Un refus du ministère
En janvier 2011, le département d’éducation physique du CVM demande au Cégep de créer un comité d’étude pour évaluer l’importance des cours d’éducation physique dans les programmes de danse. Dans le procès-verbal de la réunion du 7 avril 2011 de la Commission des études, qui est l’instance du collège qui donne avis au conseil d’administration concernant les programmes d’études et l’évaluation des apprentissages, on rend le verdict de l’analyse des programmes. Selon le comité de travail déployé à cet effet et le MELS (l’ancien ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport), « l’analyse de contenu des programmes a révélé que les éléments d’activité physique déjà inclus dans les grilles actuelles ne permettent pas d’atteindre les objectifs de la formation générale ».
La direction des études du CVM a donc intégré dans les deux programmes de danse les cours d’éducation physique dès l’automne 2012. Jusqu’à ce jour, les étudiants en danse étaient exemptés de ces trois cours, et ce, depuis le début de l’affiliation avec l’École de danse contemporaine de Montréal (EDCM) et l’École Supérieure de Ballet du Québec (ESBQ) dans les années 1990. La directrice artistique et des études de l’EDCM, Lucie Boissinot, dit que « lorsque le programme a été mis en marche en 1999 avec le Cégep du Vieux Montréal, il avait été convenu qu’étant donné le très grand déploiement d’énergie et l’activité physique inhérente à la pratique de la danse, les étudiants fréquentant l’École de danse contemporaine n’auraient pas besoin de suivre les cours d’éducation physique ».
Un dossier fort complexe
« Le dossier d’éducation physique à l’École de danse contemporaine de Montréal est un dossier fort complexe pour lequel j’ai déployé une énergie considérable », dit Lucie Boissinot. Lors de la commission d’études de 2011, elle a travaillé à démontrer les compétences acquises par les étudiants au sein de son école. Ceux-ci suivent, bien entendu, des cours de technique en danse contemporaine, mais aussi d’entrainement connexe et des cours d’anatomie. Elle a également voulu démontrer que les étudiants s’exercent en plus de leurs 2400 heures de formation.
En effet, quand on regarde les compétences ministérielles du programme de l’EDCM, on distingue des ressemblances avec celles des cours d’éducation physique au niveau collégial. Les critères de l’école de danse parlent de « maintenir une condition physique conforme aux exigences de la profession » et de « maintenir une hygiène de vie adaptée aux exigences de la profession ». L’analyse de la danse, la maîtrise d’exercices, la coopération de groupe et la gestion des blessures sont aussi dans les compétences ministérielles du programme en danse contemporaine. Les critères du ministère de l’Enseignement Supérieur, quant à eux, parlent d’« analyser sa pratique de l’activité physique au regard des habitudes de vie favorisant la santé, d’améliorer son efficacité dans la pratique de l’activité physique et de démontrer sa capacité à se charger de sa pratique de l’activité physique dans une perspective de santé ».
Lucie Boissinot considère que ses étudiants touchent à toutes les compétences des cours d’éducation physique. Elle trouve frustrant que ses élèves doivent ajouter cette charge de travail qu’elle considère déjà couverte par le programme.
Des conflits d’horaire
Pour compléter leur DEC, la plupart des étudiants en danse doivent faire leurs cours obligatoires au CVM. Certains en sont dispensés, car ils les ont déjà faits lorsqu’ils étudiaient dans un autre programme d’étude. Pour ceux qui les complètent, ces cours n’entrent pas toujours à leur horaire. Ils doivent donc être repris avec la formation continue en soirée ou en formule à distance durant l’été. Quatre cours obligatoires n’entrent pas dans la grille de cours, dont les trois d’éducation physique.
Par exemple, à la session d’automne passée, des étudiants de deuxième année en danse contemporaine devaient se déplacer chaque jeudi soir au Cégep pour assister à leur cours de yoga, alors qu’ils venaient de danser un bon nombre d’heures. Alec Charbonneau faisait partie de ce groupe d’étudiants : « On arrive chez nous et il faut directement aller se coucher pour se réveiller le lendemain à six heures pour être à l’école de danse à huit heures ». Il croit que le premier ensemble d’éducation physique, celui dédié au volet plus théorique des saines habitudes de vie, aurait suffi. Il assure que c’est le seul des trois qui l’a aidé à enrichir son programme. Alec pense qu’il faut revérifier les compétences que l’école de danse lui permet d’acquérir.
L’éducation physique est pour tous
Luc Phan, coordonnateur du département d’éducation physique du CVM depuis août dernier, ne connaît pas le cursus des programmes de danse, mais il considère que les cours d’éducation physique peuvent être un atout aux danseurs pour bonifier leurs apprentissages. « Le citoyen moyen, peu importe qu’il soit danseur, qu’il soit athlète professionnel, qu’il soit, je ne sais trop quoi, doit quand même avoir des notions de santé et de prise en charge, puis c’est ça qu’on essaie d’aller allumer ».
En tant que professeur, M. Phan est ouvert à la communication avec les étudiants en danse pour les aider à développer d’autres habiletés. Il ajoute que ceux-ci sont souvent appréciés par les professeurs d’éducation physique, parce qu’ils ont en commun un intérêt pour l’activité physique.
Solutions
Chantale Fortin, directrice adjointe aux études au CVM, était déjà à son poste lors de la gestion du dossier en 2011. Elle mentionne qu’en introduisant les cours d’éducation physique dans les programmes de danse, le cégep a essayé de trouver des pistes de solutions. Cependant, il a été difficile de trouver des accommodements entre les écoles de danse et le cégep. L’horaire des danseurs contemporains et danseurs classiques est souvent différent et le nombre d’étudiants dans ces programmes varie d’année en année. Il est donc plus ardu pour le cégep d’offrir des cours qui seraient dédiés aux étudiants en danse.
Un cours intensif d’éducation physique avait toutefois été mis en place par le CVM à la demande des programmes de danse. Les classes se penchaient sur l’entretien physique, l’activité aquatique et la gestion du stress, des sujets pertinents pour les danseurs. Les étudiants pouvaient donc compléter l’un des trois cours pendant trois semaines avant le retour de la session d’hiver. La priorité des inscriptions était donnée aux danseurs, puis aux autres élèves si le cours ne comptait pas assez d’étudiants. Cette formation intensive a toutefois été mise en arrêt en raison de l’absence de candidatures de professeurs pour donner le cours ainsi que la situation pandémique. Luc Phan ne refuse cependant pas la possibilité de réinstaurer l’intensif si la situation le permet.
Malgré tout, en apprenant l’existence de cet ancien cours intensif, l’étudiant Alec Charbonneau ne se verrait pas quitter ses vacances qu’il juge nécessaires pour sa santé physique, pour compléter intensivement un cours d’éducation physique.
Le dilemme entre l’art et le sport
Lucie Boissinot mentionne que le grand public ne sait pas nécessairement ce qui se passe derrière les quatre murs de son école. « Le danseur est comme un sportif d’élite, mais qui travaille aussi d’autres dimensions de son être », dit-elle.
Les programmes de danse contemporaine et de danse classique du CVM ne forment pas des danseurs compétitifs, mais bien des danseurs de prestations scéniques. Par conséquent, les interprètes en danse qui ne font pas de compétitions ne sont pas catégorisés comme des sportifs d’un point de vue sociétal. Les danseurs compétitifs ont, quant à eux, une récente fédération qui cherche à les promouvoir en tant qu’athlètes.
Même si l’équivalence des cours d’éducation physique est une question de comparaison entre les compétences ministérielles des écoles de danse et celles de ces cours, la vision populaire du monde de la danse reste un biais que peuvent avoir les instances gouvernementales envers les programmes de formation de cette discipline.
Rouvrir le dossier ?
Lucie Boissinot reste toujours intéressée par le dossier concernant les cours d’éducation physique, une bataille qu’elle a laissé tomber par « fin de non-retour ». La reconnaissance de l’entrainement physique de ses élèves est un aspect auquel elle accorde une grande importance.
Luc Phan, quant à lui, est ouvert à une reconsidération du dossier d’éducation physique chez les danseurs. La demande est au-delà de ses fonctions et lui seul ne peut garantir l’opinion de ses collègues à ce sujet.
Il faudrait donc que des représentants de l’École de danse contemporaine de Montréal et de l’École Supérieure de Ballet du Québec redemandent une évaluation de leur programme par le ministère de l’Enseignement Supérieur et que le Cégep du Vieux Montréal soutienne la cause dans la mesure du possible.
Le 19 février dernier avait lieu la finale locale de Cégeps en spectacle au Vieux. Émile Bourgault et Sam Tanguay sont sortis les grands gagnants de la soirée qui se déroulait en webdiffusion. Les deux élèves du collège se sont distingués avec une composition musicale.
Une amitié révélatrice
Émile et Sam ont tous les deux 18 ans. Lui est étudiant en Sciences humaines profil Questions internationales, et elle est étudiante en Art lettres et communication Option Médias. Ils ne se sont rencontrés qu’il y a quelques mois, mais leur amitié s’est développée facilement. « C’est une révélation, Sam, dans ma vie », dit Émile enjoué. Étant entouré principalement de musiciens masculins lors de ses projets solos, Émile est content d’amener un côté féminin à ses chansons, autant artistiquement qu’humainement, selon lui.
À quelques semaines de la finale locale du CVM de Cégeps en spectacle, l’accompagnatrice d’Émile s’est désistée. Émile a découvert les talents musicaux de Sam et lui a proposé de participer au numéro avec lui. En découle un duo qui les a bien surpris.
Comme on a pu le voir dans la performance de Cégeps en spectacle, Émile chante ses compositions en s’accompagnant à la guitare. Musicien autodidacte, il aime aussi pianoter, tout comme Sam, qui elle apprécie aussi le ukulélé. Les deux ne sont pas des chanteurs d’expérience, mais ils réussissent certainement à toucher le cœur des spectateurs avec des paroles sincères et poétiques. L’amertume, jouée lors de la finale locale, est d’ailleurs un texte qu’Émile a écrit pour être chanté en duo ; une nouvelle façon d’approcher la composition, lui qui est habitué d’être en solo.
Projets artistiques
Émile compose depuis quelque temps. D’ailleurs, il a sorti deux micros albums, soit Bleu pâle en 2020 et Nous aurons toujours le ciel en 2021. Le groupe avec qui il collabore est composé de musiciens qu’il avait rencontrés lors d’une finale régionale montréalaise de Secondaires en spectacle il y a quelques années.
Émile et Sam désirent collaborer à l’avenir. Émile mentionne notamment qu’il a beaucoup de compositions destinées à être chantées avec sa nouvelle amie et accompagnatrice. Pour le moment, il sera possible de les revoir chanter à la finale régionale montréalaise de Cégeps en spectacle qui se déroule le 19 mars prochain au Cégep de Saint-Laurent. On leur souhaite la meilleure des chances.
Jusqu’au 11 février, il est possible d’aller jeter un coup d’œil à l’exposition Coups de crayon à la littérature québécoise Ténèbre de Paul Kawczak présentée à l’Agora près de l’entrée principale du Cégep du Vieux Montréal. C’est une finissante de Graphisme, Anaïs Boyer, qui est à l’honneur avec ses illustrations et ses arrangements typographiques du livre de Kawczak.
Depuis 2003, le Centre d’animation en français (CANIF) du CVM permet à l’un-e des finissant-es du département de graphisme d’illustrer des œuvres d’autrices et d’auteurs québécois. Cette année, la pièce choisie est la lauréate de l’édition 2021 du Prix littéraire des collégiens, Ténèbre, de Paul Kawczak. Selon le descriptif de l’exposition, ce livre porte sur l’histoire de la conquête du Congo par la Belgique à la fin du 19e siècle : le voyage d’un géomètre belge sous les ordres de son roi, accompagné par des travailleurs bantous et d’un maître tatoueur chinois. C’est « un roman d’aventures traversé d’érotisme, un opéra de désir et de douleur tout empreint de réalisme magique ».
Anaïs Boyer a donc eu la tâche de mettre en images certains passages du livre. Elle a fait une dizaine de dessins simples et imaginatifs teintés de réalisme et de rêves. Un côté métaphorique pour certains tableaux et plus concret pour d’autres. Les couleurs sont vives et le message écrit sur les images est bien représenté. C’est une exposition qui peut se voir lors d’une pause ou qui peut être analysée plus longuement pour celles et ceux qui ont lu le roman.
Le Prix littéraire des collégiens est de retour en 2022. La sélection comporte cinq livres d’autrices et d’auteurs québécois : Tout est ori de Paul Serge Forest, Mille secrets mille dangers d’Alain Farah, Mukbang de Fanie Demeule, Valide de Chris Bergeron et Là où je me terre de Caroline Dawson. La prochaine cohorte de finissant-es en Graphisme aura peut-être la chance de revoir l’un-e des finissant-es illustrer le lauréat de la prochaine édition du prix. C’est le CANIF qui en décidera, lui qui a notamment une collection d’œuvres d’artistes du collège et qui promeut une part de l’art visuel étudiant au CVM.