Les changements climatiques et la révolution

Note: Les opinions exprimées n’engagent que l’auteur-e du texte et ne réflètent pas la vision du journal étudiant « L’Exilé ».

Le dernier rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) nous met face à un constat alarmant : si nous ne changeons pas de façon radicale nos manières de produire et de consommer, nous ferons face à un mur et des conséquences catastrophiques en découleront. Une transformation profonde de nos manières de faire et d’organiser nos sociétés est de mise et ce changement de paradigme, je l’appelle « révolution ».

Pour penser des solutions, il faut commencer par comprendre ce qui pause problème. Nous vivons aujourd’hui, en Occident, dans des sociétés surconsommatrices ne tenant pas suffisamment compte de l’équilibre des écosystèmes dont notre espèce dépend pour sa survie. Bien qu’une grande part de la population reconnaît cette situation, il reste des freins qui empêchent les changements d’arriver au moment où nous en avons le plus besoin.

Un des obstacles menaçant notre salut n’est nul autre que notre conception moderne du bonheur. Cette vision du monde hédoniste, caractérisée par la recherche sans limite des plaisirs par l’accumulation des richesses matérielles, ne convient plus à notre temps. Nous devons aujourd’hui accepter de restreindre nos désirs à l’intérieur des contraintes que nous dictent les écosystèmes. Restreindre nos désirs ne se fera pas sans peine, mais c’est le seul moyen que nous avons de limiter les cataclysmes qui menacent l’espèce et qui seront sources de maux bien plus terribles.

Réduire nos désirs ne veut pas dire ne plus répondre à nos besoins. Nous devons cependant tenter de répondre à ces besoins par des moyens conciliables avec nos écosystèmes. Par exemple, il est possible de fabriquer nos objets à partir de matières et de procédés ayant peu d’impacts sur l’environnement et de les concevoir tels qu’ils pussent être réutilisés de différentes façons ou retournés à la nature sans problème. Une autre avenue possible est la dématérialisation des réponses à certains besoins, par exemple, en matière de loisirs et de divertissement. Notez que je ne parle pas ici de numérisation. En d’autres mots, il faut transformer une partie de nos habitudes matérialistes en habitudes spirituelles, culturelles et sociales. Nous tenons pour acquis que le bonheur est dans les objets, il faudra changer de mentalité si nous voulons faire face à la crise climatique.

Un autre des obstacles à la transition écologique est notre mode de production capitaliste. Ce système, décrit, analysé et décortiqué par Karl Marx dans Le Capital il y a maintenant un peu plus de 150 ans, est toujours au centre de nos vies. Il se caractérise dans ses grandes lignes par la propriété privée des capitaux et des moyens de productions par une minorité employant une majorité de travailleurs. Une autre de ses caractéristiques se trouve dans la recherche par les capitalistes (c’est-à-dire la minorité propriétaire) de toujours plus de profits. Il existe deux moyens de faire augmenter ses profits si on vend des biens ou des services: on peut faire plus de ventes ou on peut augmenter son taux de profit. Les entreprises sont donc réticentes face aux lois qui cherchent à réglementer la production et la vente des produits, car celles-ci menacent leurs profits. Bien souvent, elles arrivent à y échapper, notamment grâce à leur pouvoir économique qui leur donne une certaine emprise sur les États. Ce sont donc les intérêts privés d’une classe possédante qui dirigent la production et la consommation dans un système capitaliste, même si ces intérêts sont parfois opposés à ceux des travailleurs, des écosystèmes et des populations en général. On peut dire que les capitalistes ont avantage à ce que la population consomme et surconsomme, puisque c’est au travers de la vente qu’ils réalisent leurs profits.

Un autre caractère propre au capitalisme est de légitimiser une répartition inéquitable des ressources et des richesses. La propriété privée des moyens de productions en est la source. En effet, le capitalisme accepte que les propriétaires accaparent les profits issus de la vente des marchandises produites et services fabriqués ou donnés par les travailleurs tout en en réservant qu’une partie aux travailleurs et aux investissements. Cette dynamique et la transmission héréditaire des richesses sont à la base des inégalités sociales observées aujourd’hui.

Serait-il juste que nous ne soyons pas tous égaux face aux sacrifices qu’exigera la transition écologique? Je crois que non. Bien au contraire, une répartition plus équitable des richesses améliorerait la condition de la population générale en ces temps pour le moins incertains. En outre, on ne peut pas demander au plus pauvre de faire des sacrifices alors qu’il vit déjà difficilement.

Comment la révolution peut-elle se faire? La non-violence est de mise, nous avons pu voir dans l’histoire les bains de sangs et les échecs qui découlèrent de bien des révolutions violentes. Il convient aussi d’éviter de déshumaniser l’ennemi et les individus découlant du système et de se souvenir que chacun mérite de vivre et de vivre heureux et à l’abri de toute forme de persécution. La révolution vise à changer un système et non pas à s’attaquer aux représentants de ce dernier. Sinon, ce n’est pas du côté du pouvoir que viendra la révolution, c’est à la population à s’organiser d’elle-même, à développer des alternatives au système et à faire pression sur les gouvernements. On ne peut pas se permettre d’attendre que les gouvernements agissent d’eux même. Il est aussi important pour la réussite de la transition que la population s’éveille quant à la crise et aux solutions possibles et qu’elle soit donc en mesure de les accepter et de les mettre en place. Il faut aussi maintenir la démocratie sans quoi le pouvoir reviendra à une minorité qui pourrait à termes être déconnectée de la réalité populaire et prendre des décisions à l’encontre des intérêts du peuple ou allant même jusqu’à menacer ses libertés élémentaires.

Sur ce, faites votre part, ne consommez pas trop, consommez bien (du moins le mieux que vous le pouvez) et profitez de la vie!

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