Obtenir son diplôme en pandémie

 

Il y a eu l’avant et l’après 13 mars 2020, journée où François Legault a déclaré la fermeture des écoles au Québec. Le ministère de l’Éducation a dû s’adapter et les enseignants et les professeurs se sont remaniés… Deux semaines, un mois, deux mois, septembre… Personne n’avait vu venir ce long temps d’arrêt. Ce sont les élèves et les étudiants qui ont le plus écopés. Quatre finissants de différents programmes du Cégep du Vieux Montréal (CVM) se sont confiés sur leur expérience d’obtenir leur diplôme en pandémie.   

Finir en « queue de poisson »  

La dernière session cégépienne clôture un chapitre important, que ce soit la fin d’un préuniversitaire, d’une technique, d’un BAC-DEC, etc. Pour les finissants 2020, la situation était bien spéciale, car la pandémie a frappé juste avant la ligne d’arrivée. Les professeurs et les étudiants devaient s’adapter rapidement, ce qui a causé d’importantes répercussions. François Pelletier, diplômé du programme Questions internationales en mai dernier, souligne n’avoir eu presque aucune vidéoconférence ou capsule vidéo de la part de ses professeurs. On ne peut pas blâmer ces derniers, car plusieurs n’avaient jamais expérimenté la formule des cours en ligne et devaient souvent concilier la continuité de leur travail et la gestion de leur famille. Cependant, certains élèves se sont sentis seuls, sans motivation pour continuer, d’autant plus que le calcul de la cote R avait été annulé.    

Gabrielle Gervais, finissante 2020 en design intérieur, soulève la difficulté de ne pas avoir pu partager et discuter avec ses paires : « Les trois-quarts de tes apprentissages c’est d’apprendre des autres et de se supporter ». Pour les étudiants de ce programme, le partage est important, l’exposition de leur projet final devait d’ailleurs avoir lieu à la fin du printemps dernier, une occasion d’être vus par de futurs employeurs. Par cause de pandémie, le tout s’est transformé en évènement virtuel. 

Manque, incertitude et inconnu 

« Je n’ai qu’une hâte, qu’une envie, qu’une attente, c’est que les salles rouvrent, parce qu’on fait de l’art vivant. L’art vivant, pour moi, ça se fait dans un théâtre, ça se fait devant du monde, et ça me désole qu’on ne puisse pas. » 

Louise Gamain, diplômée 2020 du DEC en association avec l’École de danse contemporaine de Montréal 

Diplômée du programme de danse interprétation contemporaine du CVM en association avec l’École de danse contemporaine de Montréal (EDCM), Louise Gamain, originaire de Picardie en France, a vécu une fin d’études inattendue. Avec la fermeture de l’EDCM, les danseurs de sa cohorte ont dû suivre une formation à distance. Mais danser dans un salon d’appartement, ce n’est pas idéal. Tranquillement, les cours se sont dispersés et de nombreux élèves, dont Louise, étaient démotivés. Un coup dur pour ces artistes supposément prêts à voler de leurs propres ailes vers un monde professionnel. Autre problème, ce programme recueille beaucoup d’Européens ayant un permis d’études de trois ans. À la fin du programme, celui-ci est facilement changeable pour un permis post-diplôme, un permis de travail éligible pour le même temps qu’a duré leurs études. Cependant, cette année, Louise explique qu’aucun Français de sa cohorte ne l’a reçu. Une problématique pour se trouver un futur emploi, même si l’on sait qu’en ce moment ce n’est pas le meilleur moment pour gagner sa vie en dansant. Malgré les initiatives de captations numériques de danse, elle s’exprime sur le besoin de retrouver les salles de spectacle : « Je n’ai qu’une hâte, qu’une envie, qu’une attente, c’est que les salles rouvrent, parce qu’on fait de l’art vivant. L’art vivant, pour moi, ça se fait dans un théâtre, ça se fait devant du monde, et ça me désole qu’on ne puisse pas. ». 

Pour certains, comme François Pelletier, la pandémie projetait un avenir incertain. Candidat au programme Odyssée afin d’être moniteur de langues, François ne savait pas s’il allait pouvoir déménager à Régina en Saskatchewan, ville dans laquelle il était attendu. Il s’est alors inscrit à l’Université de Montréal. Malgré la crise pandémique, il a finalement rejoint l’école où il est actuellement moniteur et a donc reporté son inscription universitaire à l’an prochain.

Le renouveau d’un ancien chapitre   

«Je suis persuadé que ne pas être dans le lieu en 3D, dans [un] cadre spatio-temporel, l’absorption de la matière est clairement moins bonne, car on est derrière un écran».

Alexis Kelly, diplômé du programme d’histoire et civilisation au Cégep du Vieux Montréal en 2020

Pour ceux et celles qui sont entrés à l’université cet automne, la formule des cours à distance n’a pas changé. Les classes se font à la maison, les élèves assis devant leur ordinateur en écoutant des cours en vidéoconférence avec leur professeur d’une durée de trois heures ou en visionnant un Power Point sans arrêt avec un contenu narré, c’est ce qu’explique Alexis Kelly, diplômé 2020 du programme d’histoire et civilisation du CVM et maintenant étudiant au département d’histoire de l’Université de Montréal. Il se préoccupe d’ailleurs du sort des étudiants qui poursuivent leurs cours académiques à distance : «Je suis persuadé que ne pas être dans le lieu en 3D, dans [un] cadre spatio-temporel, l’absorption de la matière est clairement moins bonne, car on est derrière un écran». Lui qui se dit motivé par son programme ne voudrait pas être dans la peau d’un universitaire qui n’étudie pas ce qui le passionne, car ce cursus en ligne demande énormément de motivation et de concentration, choses qu’il puise lui-même dans sa passion pour l’histoire.  

Gabrielle Gervais, également étudiante à l’Université de Montréal, mais en design intérieur, soulève que les universités ont eu le temps de préparer la session d’automne. En effet, en mars dernier, les écoles du Québec ont été prises au dépourvu face à la fermeture de leurs établissements. À présent, elles sont beaucoup plus préparées pour gérer la crise actuelle. Gabrielle était stressée de commencer un nouveau parcours dans de telles conditions, mais tout se passe bien pour elle, comme pour la plupart des étudiants avec qui j’ai pu discuter. C’est beau de voir leur courage et leur résilience dans cette crise qui nous frappe de plein fouet.  

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